Portrait d'Entreprise Adaptée

En 2021, la première Entreprise Adaptée pénitentiaire voyait le jour !

Publiée le 14 décembre 2023 par Viviane Tichit
Retour sur ces deux années d’existence avec Nicolas Larroque, Directeur Général de l’Entreprise Adaptée ENVOI
EA ENVOI

Pour la première fois en France, il y a près de 2 ans, ENVOI inaugurait, en présence de représentants des ministères du Travail et de la Justice, son Entreprise Adaptée au sein du centre de détention de Muret (31).   

Nicolas, pouvez-vous nous parler de ton EA et de votre choix de créer une EA pénitentiaire ? Quelles ont été les différentes étapes jusqu’à aujourd’hui ? 

ENVOI est une structure inclusive : elle regroupe une Entreprise Adaptée ET une Entreprise d’Insertion. ENVOI compte un total de près de 200 salariés, basés sur notre site de Colomiers à proximité de Toulouse.

Bien avant la création de notre Entreprise Adaptée, en 2013, nous avions des liens avec le secteur carcéral au-travers de notre entreprise d’insertion (accueil de salariés en insertion en liberté conditionnelle, par exemple). Lorsque nous avons pris connaissance de la loi qui autorisait la création d’Entreprises Adaptées en milieu carcéral, ce fut une évidence pour ENVOI de se positionner : notre savoir-faire dans l’accompagnement socioprofessionnel et notre connaissance du fonctionnement d’une EA et des publics en situation de handicap était un gage de réussite dans le projet.

En créant de l’emploi en détention, nous souhaitions aussi gommer une injustice : celle qui ne permettait d’accéder à l’emploi des détenus en situation de handicap. C’était aussi pour ENVOI un engagement fort pour s’engager plus ouvertement sur la thématique de la lutte contre la récidive.

Notre projet a été construit en partenariat avec la DISP (direction inter-régionale des services pénitentiaires). Il a été soutenu auprès des directions de l’agence du travail d’intérêt général et de l’insertion professionnelle (ATIGIP) et de nos interlocuteurs de la DDETS et de la DRETS. Nous avons été sensibles à leur soutien et l’accueil très favorable à notre projet.

Nous avons par la suite visité les ateliers de travail en détention et échangé avec la direction du centre de détention de Muret. Le projet a abouti mois de 6 mois après l’envoi de notre manifestation d’intérêt auprès de la DISP, bien encouragé par les soutiens des ministères de la Justice et du Travail.
  

Aujourd’hui, où en êtes-vous ? Quelles ont été vos principales difficultés et réussites ? 

Notre structure est aujourd’hui rendue pérenne par l’activité que nous réalisons, le traitement des DEEE. Elle est vouée à poursuivre son développement en diversifiant cette activité par de la réparation et du reconditionnement d’équipements informatiques. Les détenus sont formés, accompagnés dans leur montée en compétence. Nous leur permettons d’acquérir des compétences clés dans les métiers qui servent la transition écologique. Les dispositifs d’AFEST sont d’ailleurs en cours de finalisation pour permettre leur déploiement dès le début de 2024.

Pendant 2 ans, nous avons beaucoup retravaillé notre projet. Il s’est adapté aux spécificités des handicaps des détenus et aux règles (sécurité, accès, prises de décision...) qui ont propres au carcéral. Un travail important sur le maintien de la mobilisation des détenus sur leur emploi a été effectué, nous travaillons selon un modèle de rythme de travail et d’apprentissage entièrement individualisé. Nous favorisons l’employabilité des détenus même si c’est plus complexe pour suivre la gestion de notre production. Un travail de coopération sur le suivi socioprofessionnel que nous réalisons en détention est un élément clé de notre réussite. Des échanges sont maintenus pour lever des points de difficultés : identifier et orienter les détenus « OETH », apporter des préconisations médicales sur les aménagements de poste, les freins sécuritaires en détention... 

Au final, nous sommes fiers et satisfaits de voir que notre activité de DEEE est réelle et durable, qu’elle respecte les règles et réglementations en vigueur. Nous avons le soutien et la reconnaissance des détenus : c’est très valorisant !  

Nous employons 15 détenus, tous en situation de handicap.   

L’enjeu de notre démarche est aussi d’assurer l’accompagnement socioprofessionnel des détenus, en partenariat avec les SPIP. Une des conseillères en insertion socioprofessionnelle d’ENVOI intervient en détention pour renforcer une démarche qui vise à réduire les cas de récidive lors des passages « hors les murs ». Nous prévoyons notamment d’assurer l’emploi des détenus en sortie de détention dans notre structure sur Colomiers (31) qui regroupe une Entreprise Adaptée et une Entreprise d’Insertion. C’est un engagement social fort que nous portons, fruit de notre expérience dans les démarches inclusives depuis près de 30 ans.

Nous nous félicitons donc aujourd’hui d’un premier aboutissement inclusif à notre projet : le 15 novembre 2023 marquera la date de la première sortie positive, de notre EA carcérale vers notre EA « socle ». Un détenu, M. X, a suivi un parcours exemplaire dans notre atelier et a bénéficié de décisions de justice qui lui ont permis de visiter nos installations « hors les murs » et d’effectuer une période d’immersion avec nos équipes.

Après avoir obtenu l'aménagement de sa peine sous forme de détention à domicile sous surveillance électronique, M. X intègre nos activités de réparation électronique dans le cadre d’un contrat de 6 mois (CDDI). Son accompagnement socioprofessionnel sera maintenu par la même personne qui se chargeait de son suivi en détention. Nous faciliterons ainsi les perspectives d’inclusion sur le long terme.

Nous sommes fiers de cette réussite que nous tenions à vous faire partager et de prouver la vertu du partenariat avec les Entreprises Adaptées. Nous travaillons d’ailleurs activement pour qu’une seconde « sortie positive dans notre EA » puisse rapidement se concrétiser.

Nous restons, par ailleurs, entreprenants et engagés pour renforcer notre présence en détention et porter de nouveaux projets d’inclusion dont nous espérons l’aboutissement sur 2024.   
 

Pouvez-vous nous parler de ces nouveaux projets pour 2024 ? 

Nous travaillons sur la diversification de nos activités de démantèlement. Nous inscrivons nos ambitions environnementales dans des actions favorisant les déchets. Pour cela, nous prévoyons de former les détenus sur des activités de réparation et de reconditionnement de matériels et d’équipements numériques. Le projet est prêt à être déployé mais doit encore lever des questions de sécurité en détention.

Par ailleurs, nous avons élargi nos partenariats d’orientation responsable des déchets avec SUEZ. Ses activités sont particulièrement adaptées à l’environnement carcéral. Des échanges sont menés avec la direction des services pénitenciers. Ce serait l’opportunité pour ENVOI de favoriser l’emploi de détenus en situation de handicap dans des zones plus rurales, dans le département du 82 ou du 65 par exemple.
 
Pour plus d’informations : ENVOI 

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